Le formidable essor du marché de la piscine, démarré dans les années 60 en France, a créé un nouveau métier, le constructeur de la piscine, et donc un nouveau mot pour définir ce métier. Si piscinier a longtemps été en tête, internet et son implacable logique sont en train de l’enterrer au profit de pisciniste. Résultat, les professionnels ne savent plus comment s’appeler, mais le métier lui, est de plus en plus reconnu !
La profession avait choisi depuis de nombreuses années et l’avait fait savoir, la fédération en tête : un constructeur de piscine s’appelait un piscinier. Les instances officielles, les centres de formation, la presse spécialisée (dans sa majorité) avaient adopté le suffixe en -ier, que l’on retrouve dans de nombreux métiers liés comme terrassiers, plombiers ou jardiniers. Bien ancré dans la profession, et bien que récent puisqu’il nomme un métier nouveau, il semblait parti pour durer. C’était sans compter sur un choix différent du public, relayé et amplifié par internet et les moteurs de recherche : le pisciniste ! Les premières fois que l’on a entendu ce mot, on se contentait de reprendre le néophyte (“on dit piscinier”), mais avec le temps cela est devenu si fréquent que l’on a tous renoncé. Maintenant, les professionnels acceptent (voire utilisent) les deux appellations.
Piscinier ou pisciniste ?
Jusqu’en 2005, les deux appellations ont fait à peu près jeu égal auprès du grand public. Depuis, pisciniste n’a cessé de creuser l’écart sur internet, jusqu’à représenter 85 % des requêtes contre 15 % pour piscinier en juillet 2015 (source Google). Le succès appelant le succès, le mot le plus répandu devient le plus utilisé sur les sites internet pour favoriser les visites d’internautes. Il est drôle à présent de voir que les sites utilisent les deux mots, pour ne se priver de personne. Les raisons de la victoire de pisciniste sont multiples. Dans l’univers de la construction, la plupart des métiers ont des noms anciens, en -ier ou en -eur. Mais les métiers plus récents optent volontiers pour le -iste, comme on le voit avec chauffagiste ou cuisiniste. Il est vrai que la segmentation des métiers induit une idée de spécialisation et de technicité, probablement mieux rendue par le suffixe -iste. Le cuisiniste se contente de réaliser des cuisines, le plaquiste ne fait que monter des cloisons… ils sont censés exceller dans un domaine restreint. Pour le grand public, un univers aussi spécifique que celui de la piscine induit un savoir précis et justifie le suffixe.
Les raisons du succès de pisciniste
Les médias grand public ont aussi joué leur rôle, avec leur forte audience qui influe beaucoup sur les requêtes internet. Si une émission d’information utilise “pisciniste” à longueur de reportage, le mot s’inscrit dans la tête de ceux qui iront compléter leur information sur le web, et influenceront leurs termes de requêtes. Pour finir, on peut aisément supposer que le métier de paysagiste, qui est la version moderne et en plein essor de l’ancien jardinier (+ 50% de requêtes par rapport à jardinier), et dont la proximité avec la profession de… constructeur de piscine (!) a tiré le piscinier vers le pisciniste. Il est à noter que les dictionnaires n’ont pas encore choisi, car ni piscinier ni pisciniste ne sont encore rentrés dans leurs pages. Mais on peut penser que les académiciens trancheront en faveur de l’appellation la plus courante.
Des choix divers dans la francophonie
Ca se complique par contre dans les pays francophones, qui font des choix opposés. Le Canada utilise exclusivement piscinier ou Maître piscinier quand en Belgique, en revanche, on parle seulement de pisciniste… Une petite remarque pour finir : on sait que la profession n’est pas très féminisée, mais le nombre de femmes est en constante augmentation.
Ne sera-t-il pas plus simple demain de parler de pisciniste plutôt que de piscinière ?